Néolibéralisme et Jouissance

Dans son livre « Le malaise dans la civilisation », Freud établit un parallèle entre l’évolution psychique de l’individu et les progrès de la civilisation.

L’histoire de l’occident décrit ainsi une évolution, de l’organisation clanique pré-historique, forcément incestuelle ; à la royauté et le règne du Pater Familias, incarnation du Dieu unique ; puis à la démocratie bourgeoise post-révolutionnaire, qui engendra le capitalisme par la grâce du développement industriel.

Au temps de ce capitalisme triomphant, les familles élargies traditionnelles se dissolvent et se dispersent aux grès des opportunités d’emploi. C’est ainsi que naissent dans le même temps les états nations et la famille nucléaire, limitée aux géniteurs et leur progéniture.

Nous voyons ici à l’œuvre l’éternelle lutte entre Eros et Thanatos, la pulsion de vie et la pulsion de mort, décrites par Freud comme étroitement intriquées dans le psychisme humain. D’un côté, on assiste à l’agrégation continue des communautés humaines jusqu’au processus de mondialisation civilisationnel que nous connaissons aujourd’hui ; et d’un autre côté, à la désintégration de l’enracinement culturel et du lien familial des individus.

Nous sommes en quelque sorte au temps du processus d’individuation – séparation de la civilisation, processus qui, chez le sujet en devenir, lui permet d’acquérir une personnalité  un tant soit peu détachée des oripeaux parentaux, et apte à investir en son nom propre l’environnement social.

Pour autant, la civilisation continue sa progression. Jacques Lacan et Michel Foucault –entre autres- ont théorisé dans les années soixante-dix l’évolution actuelle. Soit, la prise de pouvoir de l’économie sur le politique ; et l’atomisation des sujets à la recherche éperdue d’une jouissance intrinsèquement éphémère.

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FREUD ADDICT ?

L’addiction de Freud, et non l’addiction à Freud !

En quoi l’invention de la psychanalyse, sa création, est-elle redevable des conduites addictives de son créateur, Sigmund Freud ? C’est connu, tout le monde le sait, Freud était barbu et fumait des gros cigares. Il a aussi fricoté avec la cocaïne, ce dont il ne s’est guère vanté par la suite. Y-a-t-il un lien entre la création de la psychanalyse et l’addiction de son inventeur ?

Nous sommes au printemps 1884, à Vienne. Freud est âgé de 28 ans, il est fiancé à Martha depuis 2 ans, et il se désespère de faire la grande découverte scientifique qui lui assurerait avenir financier et par-là, son mariage avec Martha. Depuis 1877, il s’emploie à des recherches histologiques sur le système nerveux dans le laboratoire du Prof. Brücke, en vain. C’est que Freud est animé d’un esprit avant tout scientifique, et c’est par pur pragmatisme financier qu’il s’est résolu aux études de médecine.

La cocaïne se répand alors dans les milieux culturels et une partie de la « bonne société ». C’est un médecin italien, Paolo Mantegazza, qui l’intronise en Europe en 1859, de retour d’un voyage au Pérou. Jusqu’alors, la substance fétiche des Incas n’avait guère fait l’objet de la curiosité scientifique des colonisateurs de l’Amérique du Sud. Cette même année 1859,  c’est à un biochimiste viennois qu’il revient d’isoler pour la première fois le principe actif de la feuille de coca. Sa production industrielle devient alors possible, et les expérimentations médicales européennes commencent timidement.

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Religion Privée Et Retour Du Refoule Religieux

Intervention aux 9èmes Rencontres de Douai « Addiction et Religion », le 2 octobre 2008

L’addiction, tout comme la religion, est une invention spécifiquement humaine. L’addiction, en quelque sorte, réactive l’extrême dépendance dans laquelle l’homme vient au monde, dépendance extrême qui est assez spécifique à l’être humain, et la religion parce qu’à partir du moment où l’homme est habité par le langage, est un être parlant, il nomme et tente de donner du sens à ce qu’il trouve autour de lui.

En toute première analyse, la religion, c’est avant tout donner du sens à ce qui dépasse l’entendement humain, c’est-à-dire la mort.

L’étymologie même du mot religion qui vient du latin « religare », signifie faire un lien, relier. Une religion est en quelque sorte un contrat social, une sorte de consensus au sens à donner au mystère qui nous entoure, voire un dogme qui s’impose aux membres d’une même tribu, d’une même culture, voire une civilisation commune.  Avec la mondialisation des échanges et les projets scientifiques, nous comprenons comment l’humanité est passée du polythéisme localisé au monothéisme mondialisé, c’est-à-dire des dieux au Dieu.

Seulement, avec la révolution industrielle, la fin de l’idéal théocratique, vous assistez à la fin aussi de l’emprise religieuse en quelque sorte, pour reprendre Nietzsche qui écrivait en 1882 « Dieu est mort », pour rendre compte par une formule très concise de l’obsolescence du fait religieux à l’ère de la modernité.

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LES TOXICOMANES SONT MAL BARRES

Journées de l’Association Freudienne Internationale, Toxicomanies : Les psychanalystes et la méthode chimique, PARIS, 25/26 Janvier 1997.

« Le Prisonnier »

            Vous connaissez sans doute ce feuilleton télévisé des années 70/80, dont les épisodes débutent invariablement par une intoxication faite au héros, agent secret démissionnaire.

            Cet espion se réveille dans une sorte de village virtuel où, à l’image de ses habitants qui s’interpellent par leur numéro, tout est mis en œuvre pour devancer les désirs et ordonner en toute convivialité la vie quotidienne.

            Il n’y a plus à se préoccuper de quoi que ce soit, et notre agent secret est sommé de faire taire ses doutes et ses interrogations, mais aussi de livrer les renseignements qu’il détient, car ce paradis a un prix, celui d’un savoir qui lui serait propre.

            La vigilante surveillance de « L’Organisation » est là pour répondre à tout et à tous selon leurs souhaits, puisque, de ce village, de toutes les façons, il n’y a pas moyen d’y échapper.

            C’est la série-culte, « Le Prisonnier », dont le village de Portmeirion a été reconstitué au Pays de Galles, sous la houlette de l’acteur Patrick McGoohan, qui ne s’est jamais remis de ce rôle.

            Eh bien, la drogue c’est comme ça, la drogue agit à peu prés de cette façon: c’est en tout cas ce que m’ont appris les toxicomanes que je rencontre. L’injection faite, le sujet à la toxicomanie évolue dans un monde parallèle, un monde virtuel d’où est exclue toute inhibition, toute crainte, toute interrogation.

            La drogue, c’est le silence des organes, et avant tout, le silence de l’organe psychique.

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METS TA DONNE

Troisième Congrès de la Fondation Européenne pour la Psychanalyse, Lien social et dé-liaison sociale, Bruxelles, 9/10/11 novembre 1996.

Je suis toujours étonné de rencontrer si peu de marginaux, ceux de mes lectures sans doute, car la plupart demeurent, ou restent fixés, si j’ose dire,  à un âge avancé chez papa et maman, chez maman surtout; beaucoup travaillent, certains étudient, font du sport, de la musique, fricotent avec un petit copain ou une petite amie, bref, arrivent à maintenir comme cela pendant longtemps une apparence de conformité sociale.

             Alors, dans le même temps, les colonnes des journaux s’emplissent de faits délictueux qui leur sont reprochés, des cités et des quartiers entiers survivent de l’économie parallèle générée par la drogue, et fait troublant, les toxicomanes ont ce rare privilège avec une certaine perversion dont il est beaucoup question dans ce pays ces jours-ci, de renforcer la cohésion sociale à leur encontre.

            Bien sûr, quand ils viennent dans un centre de soins, le plus souvent c’est que cette espèce d’écran, ou plutôt de miroir qui reflète une certaine idée de la normalité ne tient plus, pour tout un tas de raisons, c’est qu’ils ne peuvent plus faire semblant, et je crois que la dépendance au toxique, au Sorgenbrecher, « briseur de soucis » comme disait Freud, la pharmacodépendance c’est ne plus avoir à faire avec le semblant.

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Sexe, Genre et Addiction

Editions l’Harmattan

La question que nous avons choisie d’aborder aujourd’hui est une question un peu particulière, dans le sens où c’est quelque chose que nous avons comme le nez au milieu de la figure tous les jours, lorsque l’on travaille en addictologie ; une question qu’habituellement nous ne nous posons jamais. C’est-à-dire : pourquoi les usagers de substances psychoactives, alcool ou drogues, appartiennent pour près des trois quarts au sexe masculin ? Avec cette question subsidiaire, qui serait de nous interroger sur d’éventuelles spécificités de l’addiction au féminin, et de l’intérêt d’en tenir compte dans le dispositif de prévention, d’accueil et de soins en addictologie.

Nous pourrions penser comme cela en première approximation, qu’il existe un biais de recrutement, une difficulté particulière pour les femmes intoxiquées, à effectuer une démarche de soins. Par exemple, on a longtemps cantonné l’alcoolisme féminin à l’image de la femme solitaire, honteuse, s’adonnant en cachette à son vice.

Les études épidémiologiques décrivent une autre réalité, qui est que les trois quarts des décès attribués à l’alcool ou au tabac concernent la population masculine. L’épidémiologie retrouve avec une constance assez remarquable, quel que soit le pays ou la législation, le fait qu’il y ait trois fois plus de sujets de sexe masculin qui s’adonnent au tabac, à l’alcool, aux drogues illicites ou aux jeux compulsifs.

Seule la consommation de médicaments psychotropes concerne deux fois plus la gent féminine. Il paraîtrait que les médecins prescrivent bien plus facilement ces médicaments psychotropes aux femmes qu’aux hommes.

L’addiction apparaît donc sexuée. Il existe une relation étroite entre le sexe masculin et l’intoxication. Mais, qu’est-ce qu’exactement que le sexe ?

L’étymologie du mot sexe vient du latin « sexus », dont l’origine proviendrait du latin « secare » : couper, diviser.

Cette racine latine indique assez bien la séparation des sexes, ce qui constitue la caractéristique primordiale et indispensable de la reproduction sexuée.

C’est en tant qu’êtres sexués que nous sommes au monde. Le sexe est avec le patronyme le support essentiel de l’identité et même le premier trait identitaire dans la rencontre avec l’autre.

Freud écrit ainsi dans les « Nouvelles conférences d’introduction à la psychanalyse » : « Masculin ou féminin est la première appréciation que vous faites quand vous rencontrez un autre être humain. »

Dans les « Trois essais sur la sexualité« , Freud déploie sa réflexion selon trois dimensions : la dimension biologique, la dimension sociologique et la dimension psychologique. C’est sur ce schéma que nous avons construit le programme de cette journée et sur ce schéma que je vais reprendre la suite de ma présentation.

En ce qui concerne la biologie, nous ne disposons que de données scientifiques assez parcellaires et à mon sens peu convaincantes.

Tous les auteurs reprennent la notion d’un liquide corporel moindre chez les sujets de sexe féminin, ce qui rendrait compte d’une métabolisation différente des substances psychoactives et d’une gravité plus importante des pathologies induites.

De façon plus intéressante, lors de la première Journée Nationale Suisse « Genre et addiction« , en 2006, le docteur Yvan Berlin indique que le devenir des toxiques exogènes chez la femme varie selon le cycle menstruel, lors de la grossesse ou après la ménopause. La différence majeure entre homme et femme, dit-il, est liée au milieu hormonal.

Il décrit, en outre, un effet de télescopage dans l’alcoolisme féminin, soit la conjonction de l’apparition d’une tendance à l’abus plus tardive et de l’apparition plus précoce des lésions d’organes.

D’un point de vue social, les modes de consommation apparaissent moins liés au sexe anatomique des individus qu’aux rôles sociaux qui modulent les rapports entre les hommes et les femmes.

L’usage des substances psychoactives apparaît en grande partie être un usage social, façonné par l’histoire, la culture, les rapports sociaux de sexes et la représentation qu’il véhiculent (« Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire« , de mars 2009).

C’est ce que nous appelons la notion de « genre », qui se développe dans les sciences humaines à partir des « Gender studies« , nées aux États-Unis dans les années 70.

Toujours dans une dimension culturelle et sociale, la consommation de substances psychoactives apparaît bien plus stigmatisée chez les femmes, alors que chez les hommes, la prise de risque et l’intoxication sont autant de signes de virilité.

Les études épidémiologiques font apparaître, outre, une surmédicalisation des femmes, des antécédents de traumatismes et d’abus sexuels, dans 25 % des cas et surtout chez la moitié d’entre elles, l’influence décisive du conjoint.

C’est tiré de l’enquête « Coquelicot« , une enquête épidémiologique qui s’est déroulée de 2004 à 2007. La conclusion : dans la dynamique du couple, le conjoint usager de drogue est le plus souvent le détenteur du produit, l’initiateur aux drogues et à l’injection.

L’assignation sociale des femmes semble effectivement ne pas faciliter leur accès aux soins en addictologie. Entre leurs prérogatives maternelles, leur double charge professionnelle et domestique, et leur fréquente dépendance affective ou financière au conjoint ; l’organisation habituelle de la prévention, de l’accueil et des soins en addictologie peut apparaître inadaptée.

Des structures spécifiques se sont développées en Angleterre et en Allemagne. Elles sont plus nombreuses dans les pays nordiques que dans les pays méditerranéens et inexistantes dans les pays de l’Est.

En France, la prise en compte d’une spécificité féminine de l’addiction reste encore récente et parcellaire.

La troisième et dernière piste de réflexion : la dimension psychologique ou plus précisément psychanalytique.

Il y a un siècle, Freud faisait scandale, à Vienne, en affirmant le rôle central de la sexualité dans l’inconscient, et ce, dès l’enfance. L’expérience psychanalytique permet le dévoilement du sens sexuel caché du symptôme.  Par ailleurs, pour Freud, la bisexualité est originelle chez l’enfant et ce n’est qu’à l’issue du processus œdipien que s’affirme l’assomption du sexe.

« L’anatomie, c’est le destin« , affirme-t-il dans « La disparition du complexe d’Œdipe« . Mais le fait que l’anatomie soit le destin est contesté par Lacan, notamment dans le séminaire « L’angoisse« . Lacan met l’accent sur le rôle fondamental du symbolique.

Chez l’être parlant, la vie sexuelle s’affranchit de l’instinct sexuel.  Lacan dit en 1964 : « Au regard de l’instance de la sexualité, tous les sujets sont à égalité depuis l’enfant jusqu’à l’adulte, ils n’ont affaire qu’à ce qui, de la sexualité, passe dans les réseaux de la constitution subjective, dans les réseaux du signifiant. Dès lors, pour la sexualité humaine, il n’y a pas de prédétermination anatomique, pas d’objet élu préétabli, pas de finalité reproductive. »

Pour la psychanalyse, la sexualité s’exprime au travers des pulsions partielles. Pulsions partielles qui sont autant de modalités relationnelles à un autre être parlant et désirant.        La vie libidinale de l’être humain est orientée et structurée par le symbolique, c’est-à-dire par les injonctions et les prescriptions parentales, culturelles, sociales.

Lacan élabore les formules de la sexuation dans son séminaire « Encore« , pour rendre compte de la répartition des sexes selon une logique signifiante, celle de la position du sujet vis-à-vis de l’instance phallique.

Du côté homme, il se pourrait qu’il puisse l’être, ce phallus. À l’image mythique du père de la horde primitive, décrit par Freud dans « Totem et tabou« .   Du côté femme, elle échappe à cette emprise du tout phallique et peut avoir accès à une jouissance Autre.

La clinique addictive rend souvent compte de la difficulté du sujet à assumer cette position sexuée, quelles qu’en soient les raisons.

En 1975, lors de la séance de clôture des Journées des Cartels de l’Ecole Freudienne de Paris, Lacan énonce : « Il n’y a aucune autre définition de la drogue que celle-ci, c’est ce qui permet de rompre le mariage avec le petit pipi. » « Petit pipi », c’est l’expression qu’employait le petit Hans, l’une des cinq grandes psychanalyses de Freud. Tout ce qui permet d’échapper à ce mariage avec le phallus est le bienvenu, d’où le succès de la drogue.

Pour conclure cette brève introduction à notre journée de travail, il semblerait bien que, contrairement à l’assertion de Freud, l’anatomie ne soit plus le destin.

Chez l’être parlant, la vie sexuelle est éminemment corrélée au symbolique, aux lois du langage, c’est-à-dire aussi bien au discours ambiant qu’aux contraintes sociales, culturelles et morales. Dans ce contexte, les sujets masculins présentent effectivement une difficulté particulière à assumer l’instance phallique.

Mais l’émergence et le développement des études de genre semblent indiquer un dépassement, chez l’être parlant, de la binarité masculin/féminin et un effacement de la référence phallique, effacement que l’on retrouve par ailleurs dans le déclin de la fonction paternelle.

Ce que confirment les études épidémiologiques menées auprès des jeunes générations, à lire dans le « Bulletin Epidémiologique Hebdomadaire ».

La convergence des modèles de consommation masculin et féminin, chez les adolescents, témoigne des progrès de la mixité, tandis que la résistance des rites sociaux sexués à l’âge adulte va de pair avec la persistance des écarts.

En tout état de cause, la prise en compte récente, par la MILDT, de la problématique genrée de l’addiction apparaît souhaitable.

Table des matières

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Qu’est-ce qu’être toxicomane ?

Intervention aux journées de l’ALI, « Être toxicomane ? De la nécessité de théoriser les addictions », 22 & 23 juin 2019, Paris, à propos de la parution du livre de Patrick Petit  « Être toxicomane ? Psychanalyse et toxicomanie », Éditions érès

La re-lecture de ces textes si finement travaillés de Patrick Petit m’a rappelé son indéniable apport théorique qui m’a accompagné durant ces 25 dernières années d’accompagnement des toxicomanes à Douai.

Je voudrais soulever 3 points, 3 points de convergence me semble-t-il, en guise d’introduction en quelque sorte à ces journées.

Premier point : il ne suffit pas de prendre de la drogue pour être toxicomane, Freud le relevait déjà. Patrick Petit insiste : pour être pharmocodépendant, un corps suffit, les souris des laboratoires en attestent ; mais pour être toxicomane, encore faut-il être un sujet parlant, un sujet à la parole.

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Black Mirror

(Introduction aux Journées de l’École Psychanalytique des Hauts de France, 23 & 24 novembre 2019, Lille)

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Vous connaissez peut-être cette série anglaise qui date de 2011, et qui a été reprise par Netflix en 2016. C’est une dystopie, c’est à dire le contraire d’une utopie, soit une société imaginaire régie par un pouvoir totalitaire ou une idéologie néfaste.

« Black Mirror » met en scène les nouvelles technologies en envisageant les conséquences ultimes et les plus dangereuses que chacune d’entre elles influe sur le comportement humain et l’organisation sociale : au fil des épisodes, il est ainsi question d’une vedette de la téléréalité vulgaire et stupide qui arrive au pouvoir, du totalitarisme des moyens de surveillance, de l’enfermement dans des vies numériques, d’un monde où tout le monde se note, à tout moment, et où cette note détermine la position sociale… Sans doute que cela vous rappelle quelque chose : l’élection de Trump, le contrôle social chinois, les hikikomoris (ces japonais cloitrés chez eux, coupés du monde), ce qu’on appelle les réseaux sociaux : cette dystopie est déjà là !

Charlie Brooker, créateur de la série, explique dans une interview : « Le miroir noir du titre est celui que vous voyez sur chaque mur, sur chaque bureau et dans chaque main, un écran froid et brillant d’une télévision ou d’un smartphone ».

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Vivre en live

Intervention au XLIème Colloque de l’Institut d’Études de la famille et de la Sexualité & IIème Colloque du Centre Interdisciplinaire de Recherches sur les Familles et la sexualité, Université Catholique de Louvain La Neuve, 29 et 30 avril 2004

Louvain

Le lapsus internet existe, comme celui à l’origine de ce texte auquel nous avions donné d’abord comme titre « Vivre en life », avant de nous apercevoir de notre erreur. Sans s’attarder sur ce lapsus, nous retiendrons d’emblée qu’il y a de l’inconscient dans internet, qu’il y a du sujet sur le net ! Du sujet au sens psychanalytique, un sujet parlant qui en dit bien plus qu’il ne veut en dire, puisqu’en dessous de ce qui est dit, un autre discours, celui du désir, surgit dans le lapsus, le mot d’esprit et dans toutes ces manifestations de l’inconscient qui émaillent la vie quotidienne.

S’il y a du sujet, et du sujet inconscient sur internet, c’est bien que ce que l’on appelle à l’instar des anglo-saxons les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC), n’appartiennent pas simplement au monde virtuel. C’est qu’avec internet, nous n’avons pas précisément affaire au virtuel. Le virtuel signifie le potentiel, le devenir, comme la graine peut devenir un arbre. Internet n’est pas virtuel, il fait aujourd’hui partie de notre réalité, de la réalité. Il y a du sujet, du sujet à l’inconscient, qui s’exprime par l’internet, et c’est une réalité quotidienne et naturelle aujourd’hui pour la plupart des adolescents.

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Le sexe, la drogue et le genre

Intervention aux XXVIIèmes Journées de Reims : « La femme d’abord ! Enseignements issus de la pratique auprès de femmes toxicomanes, 8-9 décembre 2011 »

klimt-3-ages-femme-40x501/ Même dans la drogue, la femme n’est pas l’égale de l’homme. Les statistiques sont impitoyables, elles ne varient guère quelque soient leurs origines géographiques, quelque soit le milieu culturel : plus des trois-quarts des addicts sont de sexe anatomique masculin. Et cela concerne aussi bien les drogues licites que les drogues illicites. En ce qui concerne le tabac, il semblerait que la proportion de fumeuses progresse, ne perdons pas espoir !

Je parle de sexe anatomique, sciemment, puisque contrairement à ce que Freud affirmait au début du XXème siècle, l’anatomie n’est pas forcément le destin. Avec les formules de la sexuation, Lacan nous a définitivement convaincu que l’on pouvait aussi bien être de sexe anatomique masculin et de structuration psychique féminine, et inversement.

Les choses se compliquent à partir des années 70 et le développement des « Gender Studies », les études de genre en français. Il se pourrait alors, que l’on puisse être ni homme, ni femme.

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